J’aurais souhaité travailler dans le milieu du cheval. Vous aussi peut-être ? Je vous livre ici mon premier billet d’humeur, en tant que créatrice du site Cheval Référence. Certains auront sans doute vécu des expériences similaires et se reconnaîtront dans mes propos, pour d’autres, pour qui tout est encore possible, j’espère que ces quelques lignes leur permettront de bien peser le pour et le contre lors du choix de leur orientation.
Lorsque j’ai commencé l’équitation, aux alentours de 7-8 ans, j’ai pu constater qu’il y avait deux types de parents : y a ceux qui soutiennent à fond leur enfant, qui sont souvent là pendant les cours, connaissent la robe (et non la couleur !) de ton poney préféré, qui savent te donner un coup de main pour mettre la martingale à ton cheval et qui sont toujours partants et présents pour les concours… et il y a les autres ! Les miens faisaient partis de ceux-là. Loin de moi l’idée de me plaindre, j’ai déjà eu l’immense chance de pouvoir monter à poney régulièrement financé par papa / maman, avec de nombreuses colonies dédiées au poney chaque année, c’est déjà pas donné à tout le monde. Cependant, c’est sûr que comparé à certains, on va dire que l’équitation est arrivé comme un cheveu sur la soupe, pratiqué par aucun des deux parents et qui ont eu la mauvaise surprise que leur fille se prenne de passion pour le sport le plus onéreux de tous !
Pour l’avoir bien connu, je vais vous décrire le prototype des parents qui subissent la passion de leurs enfants. Tout d’abord dans les achats de matériel équestre, bon faut pas rêver, c’est direct Décathlon ou Go sport, les magasins spécialisés, ils ne connaissent pas ! D’ailleurs, quand tu leur décris la longue liste de matériel qui est absolument essentiel à tes yeux, ils hallucinent ! « Des quoi ? Des guêtres ? C’est quoi ça ? Mais ton club n’est pas censé t’en fournir ? C’est déjà assez cher comme ça ! »… « Pourquoi tu veux encore un tapis, tu en as déjà un ? Une autre couleur ? Mais pourquoi faire ?! »
Ensuite, les concours. Alors, décrits par les parents de la seconde catégorie, ça donne à peu près ça : « Les concours ? Si c’est pour se lever à 4 heures du matin, passer toute la journée dans le froid et dans la boue pour 3 minutes de compétition, non merci ! » Ajoutons à cela que la plupart du temps je finissais éliminée ou mal classée alors je faisais un peu la tronche, forcément ! Par ailleurs, je ne sais pas si c’est lié mais ceux qui avaient des parents de la catégorie 1 (celle des pro-chevaux !) réussissaient souvent bien mieux en concours ^^. Disons que cela a peut-être un rapport avec le fameux sujet qui fâche, on y va, on lance le débat : l’achat du poney !
Quand t’es une enfant avec des parents de la catégorie de ceux qui ne savent pas plus ce qu’est un cheval bai qu’un amortisseur de dos, l’achat du poney est un sujet qui leur donne des boutons ! « Non mais tu rigoles, tu veux nous mettre sur la paille ? » « Euh…, vous non, mon poney seulement. Et encore, c’est moins cher que sur copeaux ! ». Mais non, c’était hors de question, beaucoup trop cher et ils ne voyaient pas la différence. J’ai quand même eu un espoir lorsqu’ils m’ont promis de m’acheter un cheval lorsque j’aurai mon Baccalauréat, le saint Graal de tout parent ! Faut dire, ils voyaient ça tellement loin qu’ils ont eu la paix quelques années. Et coup de chance, j’ai arrêté pile un an avant de le passer ! Et puis entre nous franchement, ce n’était vraiment pas l’idée du siècle. C’est quand même dans les petites classes qu’on a le plus de temps de monter à cheval. Surtout lorsque tu te lances dans des études un peu poussées. On y vient…
Alors voilà, le sujet de l’orientation ! Evidemment, en passionnée d’équitation, tu t’es dit que t’allais bien trouver un métier qui te conviendrait parmi les nombreux métiers de la filière équestre. Seulement voilà, je suis sûre que nombre d’entre vous a déjà entendu cette phrase « L’équitation, c’est un loisir, pas un métier ! » ou encore « T’as vraiment envie d’être en pantalon de cheval toute la journée ? De revenir pleine de poussière ? D’être dehors en hiver et d’avoir froid ? »… Du coup je me suis lancée dans le type d’études qui plairait à tout parent, une « prépa HEC ». Autant vous dire que l’équitation est manifestement incompatible avec ce genre d’études, oubliez tout de suite, ou alors si, une fois par semaine si vous n’habitez pas loin du centre équestre mais dites-vous que ce sera votre seule sortie de la semaine ! Pour vous donner une idée plus précise, c’est le genre d’études où ton prof t’explique que chaque minute de ton temps est précieuse et que si tu prévois d’aller chez le médecin parce que vraiment t’as pas le choix (sinon ça prend trop de temps) surtout tu n’oublies pas de prendre tes cours pour pouvoir réviser dans la salle d’attente.
J’ai pas tenu le choc ! J’ai décidé de partir en droit, ça fait toujours classe sur le papier et puis au moins ça sert à quelque chose dans ta vie de tous les jours (si si, je vous assure !). A la fac c’est un peu plus faisable de monter à cheval, enfin si t’es en province, parce qu’en région parisienne faut s’accrocher, une fois ton loyer, ton électricité, ton pass Navigo et toutes les factures courantes payées, il te reste pas grand-chose et encore si tu bosses pas à côté de tes études tu peux déjà t’estimer heureux. Je montais un peu en centre équestre mais je n’avais pas les moyens pour financer une pension complète. Toutefois, j’étais patiente car une fois mes études terminées, dixit mes parents « j’aurais les moyens de m’offrir mon cheval ». Ainsi, après 7 années de longues études, j’avais décroché mon diplôme d’avocat !
Alléluia ! J’allais enfin pouvoir réaliser mon rêve, m’acheter un cheval ! J’avais mis quelques économies de côté et trouvé un super job en cabinet d’avocats relativement bien payé pour une première embauche.
Sauf que voilà, maintenant que j’avais les moyens d’entretenir un cheval, je n’avais plus le temps de monter ! Le soir après le travail me direz-vous ? Que neni ! Dans ce genre de jobs, si vous partez à 19h00, on vous sort des « tu prends ton aprèm ? ». En moyenne, je quittais le bureau vers 20 heures, le temps de rentrer, de me changer et de rejoindre les écuries, je pouvais y être pour disons,… 21h30 au plus tôt. Va trouver un prof qui te donne un cours à cette heure-là ! Sans compter que 20 heures c’était dans les bons jours, je pouvais parfois finir à 22 voire 23 heures. Bref, les seuls jours où j’étais sûre de pouvoir monter c’était le week-end, un peu loin de ce que j’imaginais en termes de vie de cavalière.
Afin d’avoir un peu plus de temps pour moi, j’ai quitté mon poste en cabinet d’avocats et j’ai rejoint une banque. Les horaires sont plus cool, j’ai beaucoup de vacances et d’avantages mais le salaire évolue relativement peu. Je dois tout compter pour faire rentrer les dépenses de ma coûteuse passion dans mon budget, mais j’y tiens ! Cela fait halluciner mon compagnon qui est non cavalier ! Avec ce nouveau job au moins je trouve le temps de monter après le travail, ce qui me permet d’aller aux écuries entre trois et quatre fois par semaines, pas si mal.
Parfois je me dis que si j’en avais fait mon métier, je pourrais monter beaucoup plus, d’autant que souvent l’employeur concède un box « gratuit » comme avantage en nature ce qui permet de faire de substantielles économies. Est-ce que cela aurait été mieux ? Je ne sais pas. Certains de mes amis qui étaient dans le milieu en sont revenus et se sont reconvertis dans d’autres domaines qui n’ont parfois rien à voir, comme l’informatique ou le commerce. Aurais-je été plus heureuse en faisant de ma passion mon métier ? Il me faudrait une deuxième vie pour le savoir !
Et vous, quel choix avez-vous fait ? Cheval loisir ou cheval métier ?
Pour en savoir plus sur les métiers autour du cheval rendez-vous sur le site de l’Ifce : https://equipedia.ifce.fr/metier-emploi-et-formation/metier