Depuis le début du confinement due à l'épidémie de coronavius (Covid-19), nous sommes privés de la possibilité d'aller voir nos chevaux alors que l'attestation de déplacement dérogatoire prévoit qu'il est possible de réaliser des « Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés (...) aux besoins des animaux de compagnie. » En dehors du fait que notre écurie est rarement située à moins d'un kilomètre de chez nous, l'autre argument qui a été soulevé est que le cheval n'est pas considéré juridiquement comme un animal de compagnie.
En effet, le droit en vigueur considère le cheval comme un « animal de rente ». Quelle est la différence avec l'animal de compagnie ? Pourquoi un cheval n'est-il pas considéré aux yeux de la loi comme un animal de compagnie au même titre qu'un chien ou un chat ?
L'animal de rente, selon le Dictionnaire de l'Académie française, est « un animal d’élevage fournissant un produit ou un travail qui rapporte un revenu ». Par « produit », dans le cas du cheval, on entend en particulier sa viande (mais cela s'applique également au lait de jument).
L'animal de compagnie, quant à lui, est définit par le Code rural comme un « animal détenu ou destiné à être détenu par l'homme pour son agrément. » (article L.214-6 du Code rural). Les animaux de compagnie sont essentiellement les chiens et les chats. Il y a également un cadre juridique qui s'applique aux NAC (nouveaux animaux de compagnie)
Plusieurs propositions de loi ont eu pour intention de modifier le statut juridique du cheval :
- la proposition de loi n°2361 du 24 janvier 2010 visant à modifier le statut juridique du cheval en le faisant passer d'animal de rente à animal de compagnie ;
- la proposition de loi n°1191 du 26 juin 2013 visant à modifier le statut juridique du cheval en le faisant passer d’animal de rente à animal de compagnie.
Or, ces propositions ont toujours échoué. Quels sont les arguments des opposants à cette réforme ? Les arguments qui reviennent sont sont relatifs à l'hippophagie (consommation par l'homme de viande de cheval) et à la pratique de l'équitation.
Premièrement, en passant le cheval sous le statut d'animal de compagnie, l'hippophagie ne serait plus possible en France. Les opposants à la réforme soutiennent que ce serait cependant problématique pour la filière équine car on ne saurait que faire des chevaux de course réformés qui constituent la majeur partie de la viande chevaline vendue en France et qu'en outre certaines races de chevaux de trait pourraient disparaître en raison de l'absence de débouchés commerciaux. Il est également mis en avant que la viande de cheval risquerait d'être importée des autres pays européens et que nos chevaux de courses réformés seraient envoyés à l'abattoir à l'étranger dans de mauvaises conditions de transport en matière d'hygiène et de sécurité.
Le second argument qui est avancé est que la pratique de l'équitation pourrait être remise en cause par cette réforme. En effet, le cheval « animal de compagnie » serait mis sous la protection de la convention européenne de protection des animaux de compagnie laquelle prévoit qu'« aucun animal de compagnie ne doit être dressé d’une façon qui porte préjudice à sa santé ou à son bien être, notamment en le forçant à dépasser ses capacités ou sa force naturelles ou en utilisant des moyens artificiels » (article 7) et qu'« aucun traitement ne peut (lui être appliqué), ni aucun procédé utilisé, afin d’accroître ou de diminuer le niveau naturel de ses performances au cours des compétitions ou à tout autre moment, si cela peut constituer un risque pour la santé et le bien être de cet animal» (article 9). Les opposants à la réforme soutiennent que ces dispositions pourraient porter préjudice à la pratique de l'équitation à cause de l'utilisation de moyens artificiels tels que l'éperon, la cravache ou encore les enrênements.
Il est permis de douter de ce second argument. En effet, les juges savent faire la part des choses et l'équitation telle que nous la pratiquons ne constitue pas un danger pour la santé de nos équidés puisque nos retraités vivent en général très longtemps après leur carrière sportive. En revanche, cela pourrait certainement remettre en cause certaines pratiques trop sévères pour le bien être de nos chevaux telles que röllkur, les enrênements trop sévères ou les muserolles serrées à l'extrême.
Reste donc comme principal argument argument aux opposants de la réforme le problème de la fin de vie des chevaux.