La déduction pour épargne de précaution (« DEP ») qui s’appliquait déjà aux éleveurs équins depuis 2019, a été étendue aux centres équestres par la loi de finances pour 2021 (Loi 2020-1721 du 29-12-2020 art. 12). Ce dispositif, certes un peu technique à appréhender, mérite qu’on s’y intéresse, puisqu’il peut permettre aux exploitants agricoles de réduire, voire d’annuler leur impôt sur le revenu.
Quels sont les établissements concernés par ce dispositif ?
Ce sont les établissements soumis à un régime réel d’imposition, c’est-à-dire ceux qui ne sont ni soumis à l’impôt sur les sociétés ni à un régime micro. Ce dispositif s’applique également aux GAEC et aux EARL qui n’ont pas opté pour l’impôt sur les sociétés.
En quoi consiste cette déduction ?
En principe, les personnes qui gèrent des centres équestres ou des élevages équins imposés selon le régime du bénéfice réel intègrent dans leur impôt sur le revenu la totalité du bénéfice réalisé dans l’année, peu importe que ce bénéfice soit ou non distribué. En conséquence, si l’établissement décide de mettre de côté une partie de son bénéfice en prévision de dépenses ultérieures, le gérant payera quand même de l’impôt sur cette fraction de bénéfice économisée.
Le dispositif prévu à l’article 73 du Code général des impôts permet de pallier cet inconvénient et d’exonérer d’impôt sur le revenu les sommes mises de côté par l’établissement afin d’anticiper des dépenses futures.
A quel montant peut s’élever cette déduction ?
Le montant de la déduction est égal au plus petit des trois montants suivants :
- Un plafond qui varie selon un barème ;
- Un plafond qui tient compte des déductions faites au titre des exercices précédents ;
- Le montant du bénéfice imposable lui-même.
- 1er plafond : le plafond déterminé en fonction du montant du bénéfice imposable :
Bénéfice imposable |
Plafond de déduction |
Bénéfice < 27 000 € |
100 % du bénéfice |
27 000 € < bénéfice < 50 000 € |
27 000 + 30% du bénéfice excédant 27 000 € |
50 000 € < bénéfice < 74 999 € |
33 900 € + 20% du bénéfice excédant 50 000 € |
75 000 € < bénéfice < 99 999 € |
38 900 € + 10% du bénéfice excédant 75 000 € |
Bénéfice > 100 000 € |
41 400 € |
Cela signifie qu’un établissement, dont le bénéfice est par exemple de 26 000 € sur l’année, pourra bénéficier d’une DEP d’un montant égal à ce bénéfice et donc payer 0 € d’impôt sur le revenu au titre de l’année de la déduction (sous réserve de respecter les conditions d’épargne décrites ci-après).
- 2e plafond : le montant total des DEP pratiquées au cours des années précédentes
Le montant maximal de déduction au titre d’une année est égal à 150 000 € moins les déductions pratiquées au titre des exercices précédents et non encore réintégrées au résultat (c'est à dire tant que les sommes épargnées n'ont pas été dépensées). Autrement dit, le cumul des déductions au titre des différentes années ne peut excéder 150 000 €.
- 3e plafond : la DEP ne peut jamais créer ou augmenter un déficit
Dans la mesure où la DEP ne peut jamais donner lieu à la constatation ou à l'augmentation d'un déficit, le dernier plafond est constitué du bénéfice imposable après application d’un certain nombre d’abattements (voir § 60 du BOI-BA-BASE-30-45-20).
Exemple : au titre de l'exercice 2020, un éleveur a réalisé un bénéfice de 24 000 €. Il bénéficie d'un abattement de 75% au titre son installation récente (abattement sur les jeunes agriculteurs, art. 73 B du CGI), son bénéfice imposable est donc égal à 6 000 euros. La DEP ne peut donc excéder 6 000 €.
NB : pour les GAEC et les EARL, les 1er et 2e plafonds sont multipliés par le nombre d'associés exploitants dans la limite de quatre.
Quelles sont les conditions à respecter pour bénéficier de cette déduction ?
Pour bénéficier de cette déduction, l’exploitant doit avoir constitué une épargne de précaution au moins égale à 50% du montant de la déduction pratiquée.
Cette épargne peut être réalisée sous différentes formes :
- sous forme d’argent déposé sur un compte bancaire dédié ;
- sous forme de stocks (fourrages ou stocks de produits ou d’animaux dont le cycle de rotation est supérieur à 1 an) ;
- sous forme de créances (détenues sur des coopératives agricoles dont l’exploitant est associé et d’organisations de producteurs auxquels il adhère).
Exemple : un exploitant dont le bénéfice est égal à 26 000 € doit constituer une épargne de précaution au moins égale à 13 000 € pour bénéficier d’une déduction égale au montant de son bénéfice. Pour cela, il peut choisir de mettre 10 000 € sur un compte bancaire dédié et compter sur les 3 000 € de stock de foin et de paille qui sont inscrits à l’actif de son bilan.
A quel moment cette épargne doit-elle être constituée ?
L’épargne doit être constituée dans les 6 mois de la clôture de l’exercice. De la sorte, l’exploitant peut déterminer son bénéfice annuel et décider du montant qu’il souhaite placer en épargne de précaution en tenant compte des stocks et créances entrant dans le calcul de l’épargne de précaution.
Quelles dépenses sont concernées ? Sous quels délais ces dépenses doivent-elles être réalisées ?
Le texte est assez large puisqu’il est question de « dépenses nécessitées par l'activité professionnelle ». Selon une réponse ministérielle, « le nouveau dispositif ne comporte plus de liste limitative des cas d'utilisation. L'exploitant agricole peut utiliser les sommes déduites sans contrainte, dès lors qu'elles servent à financer des dépenses nécessitées par son activité professionnelle » (réponse à la Question écrite n° 08956 de M. Laurent Duplomb).
La DEP doit être utilisée dans les dix ans suivant l'année au cours de laquelle elle a été constituée.
Compte tenu de la complexité du dispositif, nous vous recommandons de vous référer à votre comptable pour mettre en place cette déduction pour épargne de précaution dans les règles.
Article publié le 14 janvier 2021